andata.ritorno  laboratoire d'art contemporain

 

 « Les balises du silence »

Ou quelques signes prémisses au tremblement du capital
 

curateur : Joseph Farine

Le parti pris de l’exposition « LES BALISES DU SILENCE » est de mettre en relation deux travaux photographiques traitant sous des facettes différentes du thème de l’enfermement, les images sont mises en échos par des stations textuelles basées essentiellement sur la citation.

Il en résulte une expo-concept traitant de manière métaphorique de la panique du monde de la marchandise dans la situation actuelle. Le système économique est pris à son propre piège au même titre que les animaux sauvages réduits à l’état spectacularisé par le monde civilisé. L’industrie du spectacle des animaux en captivité est un archaïsme de la marchandisation généralisée ou la notion de valeur elle-même a perdu ses repères. La suprématie de la valeur d’échange entretient le marasme de la société du spectacle qui ne fait que se démultiplier avec les moyens technologiques actuels. La nature est en péril plus que jamais. La plus-value financière a son pendant dans le pouvoir d’autodestruction généralisé.

Jean-Daniel Meyer a réalisé un travail photographique noir blanc au printemps 2003, au moment du sommet du G8 en France voisine, alors qu’une importante manifestation altermondialiste était prévue dans les rues de Genève. A l’approche de cet événement, une grande peur s’empara des commerçants et des banquiers du centre ville. Afin de se protéger des manifestants, ils baissèrent leurs rideaux métalliques, leurs stores et firent ériger à la hâte des palissades, de véritables forteresses de bois, autour de leurs vitrines, de leurs bureaux. Il se dégagea de ces rues ainsi transformées, un sentiment de retrait, de réclusion, de peur obsessionnelle d’une étrange violence. Jean-Daniel Meyer en réalisant à cette occasion une série d’images très sobres «  a tenté de saisir comme dans un jeu de miroirs, nos propres angoisses, nos propres enfermements » .

De son côté, Regina Beith a réalisé des prises de vue d’animaux en captivité dans les zoos de Barcelone et de Bâle. Ces photographies dégagent une charge émotionnelle qui abolit tout commentaire. Les regards et les attitudes de ces animaux captifs n’ont rien à envier au pouvoir de l’expressivité humaine, ils nous renvoient, quant à eux, le miroir de l’aberration de leur condition. Si la civilisation a inventé pour le genre humain le système de la prison pour « surveiller et punir »1), l’homme n’hésite pas à dénaturer des animaux de leur contexte vital à des seuls fins de loisir exotique.                                                         1)Michel Foucault

Cette exposition réunit deux travaux photographiques qui n’étaient pas destinés à se rencontrer au départ, mais qui ont pour point commun le choix de la suggestion plutôt que le statut du reportage.

Les images de la performance « Coyote » de Joseph Beuys sont là au titre de citation visuelle en rappel de la position exemplaire d’un artiste qui a choisi l’enfermement volontaire avec un animal sauvage comme signe symbolique de défense de la nature et des valeurs universelles.

 

 

 

photographies :

Regina Beith : Captivités

Jan-Daniel Meyer : Part d'ombres - G8

 

 

 

 

 

 

 

 

Joseph Beuys, extraits filmés

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« On emmène un enfant pour la première fois au jardin zoologique. Cet enfant pourrait être n’importe lequel d’entre nous, ou inversement, nous avons été cet enfant et nous ne nous en souvenons pas. Dans ce jardin, dans ce terrible jardin, l’enfant voit des animaux vivants qu’il n’a jamais vus, il voit des jaguars, des vautours, des bisons, et, ce qui est plus étrange des girafes. Il voit pour la première fois la multitude effrénée du royaume animal, et ce spectacle qui pourrait l’alarmer ou l’horrifier lui plaît. Cela lui plaît tellement qu’aller au jardin zoologique est un divertissement enfantin ou peut lui sembler.  Comment expliquer ce fait commun et en même temps mystérieux ? Nous pouvons le nier. Nous pouvons prétendre que les enfants brusquement emmenés au jardin zoologique souffrent, vingt ans après de névrose, la vérité est qu’il n’y a pas de personne adulte qui, bien examinée, ne soit pas névrosée. Nous pouvons affirmer que l’enfant est, par définition, un découvreur. Le chameau n’est pas plus étrange que découvrir le miroir de l’eau ou les escaliers. Nous pouvons affirmer que l’enfant a confiance en ces parents qui l’emmènent à cet endroit avec les animaux. »

                                                           J.-L- Borges ( Le livre des êtres imaginaires)

 

 

…un voyou qui ressemblait à mon amour vint à ma rencontre

       et le regard qu’il me jeta me fit baisser les yeux de honte.

              Guillaume Apollinaire  (La chanson du Mal- aimé)

 

 

 

La sensibilité libertaire pure ne pourra jamais se confondre avec les actes partisans du nihilisme et du terrorisme. Les palissades érigées par le monde marchand au moment du G8 du printemps 2003 s’affichaient comme les signes paniqués de l’économie de marché. Il ne s’en est fallu que de quelques années de plus pour que celle-ci doive s’inventer des systèmes de régulation pour perdurer. 

   

G8, G20… « Le capital qui joue aux dés notre royaume. »1)

« SEULE UNE NOUVELLE PERSPECTIVE DU NAUFRAGE POURRA SAUVER LE TITANIC ! »2)

LACHEZ LES FAUVES !

« DIFESA DELLA NATURA »3)

1)      Léo Ferré

2)      Philippe Deléglise

3)      Joseph Beuys

 

***

« Aux Etats-Unis, ce ne sont pas les tableaux qui sont chers, c’est l’argent qui est bon marché. L’économie a créé de nouveaux milliardaires et il y a beaucoup d’argent disponible, y compris pour l’art. »

                                                       Steve O’Hara (marchand d’art new-yorkais – Mai 2004)

 

 

Mon siècle, ô fauve, qui saura

Plonger les yeux dans tes prunelles,

                   Ossip Mandelstam

 

 

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… « Et nous resterons quelques abstraits »1) au-delà « des murs blancs de l’immobilité ».2)

La liberté est le mot galvaudé que l’on sait, hérité et premier des Droits de l’homme. Si la Révolution française a institué les prérogatives au respect humain,  Joseph Beuys a créé le Parti des animaux en 1966, - mais qui donc inventera la Charte du Droit des bêtes ?

St-Just et Saint François d’Assise sont deux pensées comme métaux en fusion, combattantes à haute tension de la noblesse universelle.

1)      Léo Ferré

2)       Jacques Monory

 

 

« Que le monde aille à sa perte, il est bien temps. Vous savez, Karl Marx c’est fini ! »

                                                                                Marguerite Duras  (Le camion)

 

 

 

Le spectacle est le mauvais rêve de la société moderne enchaînée, qui n’exprime finalement que son désir de dormir. »

                                                                                                            Guy Debord

 

 

 

Frères humains qui après nous vivez,

N’ayez les coeurs contre nous endurcis,

Car, si pitié de nous pauvres avez,

Dieu en aura plus tôt de vous merci.

Vous nous voyez ci attachés, cinq, six :

Quant de la chair que trop avons nourrie,

Elle est piéça dévorée et pourrie,

De notre mal personne ne s’en rie ;

Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

                                                François Villon

 

 

 

vue de l'exposition

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Ce que je suis

n’est pas inscrit

n’est pas représenté dans l’homme

l’homme n’est qu’un bloc opaque

et qui se meut

avec le réprimé

refoulé

et irrévélé

dont chaque geste est une révélation spontanée »

                                               Antonin Artaud

 

 

            

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

vue de l'exposition