andata.ritorno  laboratoire d'art contemporain

 

Carte blanche A Bras le corps

 

Robert  Solyom

« Erosions »

Robert, un jour

 

La question de l’expression était d’emblée l’enjeu de quantité de réponses à faire et à défaire cet après-midi d’un samedi de septembre où Robert Solyom vint pour la première fois à Andata Ritorno. Je ne connaissais de lui que peu de choses, le film de Jacques Dutoit, l’appréciation de mes amis de la revue « A bras le corps ». Et c’est d’emblée sur le terrain polémique de l’expressionnisme que la conversation s’engagea avec passion, en effet  donner une carte blanche autour d’une œuvre expressionniste est une forme de défi à mes propres priorités puisque en 27 ans et 230 expositions maintenant, ce genre n’a été présent dans la trajectoire d’Andata Ritorno qu’à quelques rares exceptions. Notamment avec l’artiste italien Filippo Di Sambuy, mais dont l’une des prestation tenait plus de l’ installation que de la peinture.

 

D’où me vient cette résistance face à ce domaine, bien que l’éventail de mes choix artistiques puisse ratissé très large ? La programmation de ce lieu en témoigne dans son éclectisme délibéré, de la photographie au dessin, de la sculpture à l’environnement. Il m’importe de défendre autant des démarches conceptuelles strictes que des propositions de plasticité pure.

 

A ma perception, peut-être que le geste expressionniste  est en fait un travail de funambule,  au pire il tombe à plat et très vite,  car il est dans son entité de jouer sur la notion de mouvement. Dans ce cas, nous serons dans la déception pure par manque d’énigme et de mystère.  Au mieux, il est un ravissement  quand il est la porte ouverte sur des énergies révélatrices immenses et sur un langage pictural novateur comme chez Jackson Pollock , ou bien encore l’investigation d’une pertinence magistrale de la notion de vitesse dans les écritures/peintures d’Henri Michaux. Il peut prendre des formes très différentes, du geste tachiste premier à l’élaboration lente, dense, repentie puis approuvée de couches en glacis  traversés, retrouvés, réfléchis pour aboutir aux résultats picturaux  sidérants de Bacon. A prendre ou à laisser l’expressionnisme est un chapitre immense et non clos de la modernité.

 

Exprimer par refus d’illustrer, tel était la position de Pollock. En1944 (c’est-à-dire 11 ans avant sa mort)  un critique lui disait  dans une revue d’art et d’architecture : « C’est Freud qui a dit que l’accident n’existait pas, qu’est-ce que vous en pensez ? » et Pollock de répondre : « Je crois que c’est en gros ce que je pense ». Cette incidence sans hasard,  Jackson Pollock y a passé son énergie jusqu’à en perdre la vie dans le tragique accident de voiture que l’on sait .

 

De l’expressionnisme, je ne garderai donc pour ma part principalement que la première syllabe, c’est-à-dire cette idée d’urgence, à faire, à dire, à sortir, à peindre, car l’EX est une poussée et non un retranchement, la dénégation du refuge pour aller vers le risque et l’autre. Une nécessité née du dedans qui pousse au dehors, une corde tendue qui a rendez-vous avec un influx nerveux.

Dans la carte blanche avec laquelle nous avons rendez-vous aujourd’hui, les contours noirs faits d’intensités lumineuses de la peinture de

Robert Solyom nous invitent à une exploration énergétique et vitale toujours à reconquérir.

 

Joseph Farine

Octobre 2008

Vue de l'exposition, andata.ritorno
Peinture murale, 2008, andata.ritorno, 400 x 450cm

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