andata.ritorno  laboratoire d'art contemporain

Andrea Marconi

Peintures

Vernissage jeudi 10 octobre dès 18h

Exposition du 10 au 19 octobre 2019
du mercredi au samedi de 14h à 18h

Marconi
© Andrea Marconi, Serifos (détail)


Rêver l’inexprimable des nuages

« L’éclair me dure. »
René Char


Peindre est un acte décisif de la pensée. Rien ne vous y oblige. Cela correspond à une nécessité. C’est cet enjeu, cet impératif, cette urgence qui appelle et motive la pratique picturale d’Andrea Marconi. Le réel n’est peut-être qu’une empreinte appelant le rêve, encore faut-il que ce rêve perdure au fil des heures nécessaires à en rendre compte, à exprimer l’indicible, dans le rapport visionnaire que l’on peut avoir vis-à-vis du monde. Dans la peinture d’Andrea Marconi, cette vision du monde passe par une forme de nuagisme, mouvement pictural traversant l’histoire des images et de la peinture depuis le fond des temps.
Pour répondre à cette urgence, il est un lieu de travail que l’on appelle communément l’atelier, et qui n’est rien d’autre, par ailleurs, que l’anagramme du mot « réalité ». La géométrisation est chez cet artiste du côté du floutage, autrement dit une manière paradoxale, élégante et raffinée de mathématiser le réel. L’héritage de la Renaissance est à reprendre chaque jour, chaque mois, chaque heure, chaque seconde pour que ce mot soit digne de son besoin d’Eternité. Dans ce lieu privé de l’atelier, Marconi investit la nécessité qui lui est propre. Il travaille avec ce matériau de base qu’est l’huile ou avec des matériaux plus modernes appelés cobra, qu’il nous fait découvrir. Les outils sont bien là. Marcel Duchamp avait revendiqué la supériorité de la peinture, ayant à faire avec la cosa mentale plutôt que le goût prononcé de nombreux peintres pour une peinture strictement rétinienne. Il ne peut y avoir de peinture que mentale, et dans l’apparent formalisme en jeu chez Andrea Marconi la matière est travaillée par l’intuition, par le hasard autant que par l’inconscient et la maîtrise suprême que cela présuppose.
Dans les images de l’artiste, quel que soit leur format, il s’agit bien ici d’un véritable travail d’arpenteur de la cosmographie, à savoir le dessin du ciel. Leonardo da Vinci a bâti son œuvre, d’une intelligence inouïe, sur cette conscience que l’Univers est édifié sur les mêmes structures, sans cesse et partout, de la traduction de l’infiniment grand à l’infiniment petit.
Ecrire, écrire contre, écrire tout contre la peinture. René Char disait : « Certains jours il ne faut pas craindre de nommer les choses impossibles à décrire ». La peinture porte en elle une forme exceptionnelle de pouvoir de descriptibilité du monde. La chance de la peinture est de renvoyer – par l’entité des images, des choses, des émotions, des pensées qui passent par les statuts de la vision, de l’admiration, de la délectation même, selon le mot fameux de Nicolas Poussin – à un système interprétatif du monde. La matière n’a de sens que si elle est une invitation à l’espace de l’immatérialité. L’art vrai n’a de sens que s’il est une recherche de la chose immatérielle. C’est ainsi que certaines peintures, rares il est vrai, sont capables par leur pouvoir de suggestion de vous donner des possibilités uniques de voir le monde différemment. N’oublions jamais dans cet amour du nuagisme dont nous parlions, que Breughel a été le premier à représenter la neige qui tombe.
Andrea Marconi a choisi depuis plusieurs années le médium de la peinture comme suprême passion existentielle, et il est certain que cette urgence créatrice a sans doute changé sa vie, comme elle nous donne également, avec une extrême générosité, la possibilité de voir le monde un peu différemment. Ces toiles sont le résultat d’une exigence, d’une urgence, bien au-delà de la seule notion de besoin. L’artiste nous livre, avec force autant qu’avec évidence, ces paysages de l’âme qui sont faits dans la plus grande exigence de ce qu’il faut bien appeler quand même un métier. La peinture d’Andrea Marconi appelle à la mémoire de nombreux paysages, de Corfou au Mediterraneo, de Trieste à Libia, d’Amorgos au Jura, tout cela pour nous inviter à être, de nuit comme de jour ou en toute saison, un peu plus marqués du sceau de la qualité lyrique, essence même du romantisme. Une vision du monde, fait de spleen comme de joie, de celui qui sait ouvrir les yeux, héritage d’un passé culturel allemand comme anglais, il est une victoire plausible et possible sur le monde désenchanté de la mélancolie. Châteaubriand nous l’avait dit : « On habite, avec un cœur plein, un monde vide ».  Je l’avais écrit à propos d’Ariane Monod : si la poésie a un pouvoir suprême de transmission sur la peinture, il en est de certaines peintures dont le pouvoir d’évocation devance décidément tous les mots.
Loin du zapping omniprésent d’un carrousel infini d’images qui perdent tout leur sens dans leur surenchère, la peinture d’Andrea Marconi nous invite aussi bien à la mémoire de la mer qu’à la contemplation inassouvissable du ciel.
L’amour des horizons par tous les vents, par tous les temps, par tous les pays déjà visités, et tous ceux inconnus que l’on berce dans l’intimité de nos rêves, certaines œuvres nous  le révèlent, qui soulignent l’indispensable amour infini de la vie et la chance de celui qui sait ouvrir les yeux.

Joseph Charles Farine
Octobre 2019

 

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